Petit-déjeuner avec Christian Eckert, secrétaire d’Etat au Budget
Publié le 8 avril 2015Le mardi 7 avril 2014 , nous avons eu le plaisir d’accueillir Christian Eckert, secrétaire d’Etat au Budget.
-Le CICE a les défauts de ses qualités. Simple, il n’est pas très bien ciblé
-L’ajustement « structurel » exigé par Bruxelles est « surdimensionné »
-Les collectivités locales doivent réduire leurs dépenses de fonctionnement plutôt que leurs investissements
Le secrétaire d’Etat au Budget en est conscient : « arides et complexes » les sujets budgétaires, suscitent « la méfiance des Français » soumis à des réactions « simplistes », « démagogiques », voire « populistes » alors que les politiques sont tiraillés entre le temps de l‘arbitrage et la mise en œuvre de décrets qui peuvent mettre « un an » alors que le rythme médiatique est « instantané ». Voilà pourquoi, selon Christian Eckert, on ne parle que des « perdants et non des gagnants ».
Ainsi de la fin de la part déductible de la CSG qui a fait « 300 000 perdants mais 700 000 gagnants ». De même le crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE) pour la main d’œuvre non qualifiée est encore peu utilisé alors qu’il s’agit d’un dispositif très simple d’allègement de charges. « Nous n’avons pas su « vendre » ce dispositif » reconnait Christian Eckert. Réticent à l’origine, le ministre rappelle qu’au sein d’un gouvernement « l’unité doit primer » et admet que le CICE a « les défauts de ses qualités » : il est simple mais « pas très bien ciblé ».
Sur la trajectoire budgétaire, le ministre se veut prudent. S’il se félicite qu’en terme de conjoncture, les « astres soient bien alignés » (très faible inflation et des cours du pétrole, bas taux d’intérêt), il en est un qui ne brille guère, celui des investissements, notamment des PME qui ont encore « des relations tendues avec les banques ». Au point qu’il s’interroge « sur l’efficacité de BpiFrance », le bras financier de l’Etat, dont le président François Hollande a annoncé qu’il allait augmenter ses prêts. Ce réveil des investisseurs manque encore pour conforter une croissance sur laquelle Christian Eckert réaffirme son « humilité » face aux prévisions à 18 mois. Elle est toujours prévue à 1% pour 2015, même si une embellie n’est pas à exclure.
Mais quelques jours avant la présentation, le 22 avril, à la Commission européenne du projet pluriannuel 2016-18 de la France, il se félicite des résultats engrangés en 2014 : prévu à 4,4% du pib, le déficit public s’est inscrit à 4% grâce une « augmentation des recettes plus rapide que celles des dépenses » limitée à 0,9%, la plus faible depuis 1998. Christian Eckert assure que la France trouvera, d’ici au 22 avril, les 4 milliards d’économies supplémentaires réclamés par Bruxelles, en contrepartie de la concession d’un troisième délai de deux ans pour ramener le déficit public en deçà de 3% du pib. Mais le ministre regrette que la Commission ait, en outre, recommandé un ajustement structurel –hors conjoncture- de 0,8% du pib en 2016 et de 0,9% en 2017. Un ajustement qu’il juge « surdimensionné ».
Quoi qu’il arrive, la promesse d’une pause fiscale sera tenue, « je m’en fais le greffier » réaffirme-t-il. Les prélèvements obligatoires, qui étaient de 44,7% du Pib en 2014, un niveau « inédit depuis 2009 », reviendront à 44,5% cette année. Interrogé sur une éventuelle baisse de l’impôt sur les sociétés, le ministre estime qu’il serait prématuré d’y toucher en cours d’année, sans pour autant fermer définitivement la porte à une décision, mais dans « un mouvement d’ensemble ».
Or, aucune réforme fiscale profonde n’est, selon lui, envisageable en dehors d’une solide croissance. Reste qu’il n’est pas question de « jouer uniquement du rabot » fiscal. Christian Eckert en veut pour preuve les réformes structurelles sur les dépenses de santé et les médicaments. Quant à la dotation générale de fonctionnement des collectivités locales, elle sera réformée d’ici à la fin de l’année.
Mais, pour bien connaitre ces problèmes pour avoir été maire de Trieux et Vice-président du conseil régional de Lorraine, il rappelle que seuls 28% des recettes des collectivités locales proviennent de l’Etat. Les trois leviers des collectivités locales sont connus : l’impôt, toujours très délicat à manier ; l’emprunt, encore possible pour celles qui disposent encore d’une marge ; la baisse des investissements. Or si nombre de collectivités locales ont vu leurs dépenses baisser du fait d’une inflation minime et de frais énergétiques réduits, il est inquiétant qu’elles aient rogné sur l’investissement, en baisse de 8 à 10% l’an dernier. « On est toujours rattrapé par les retard d’investissement » rappelle le ministre qui appelle les collectivités locales à mieux veiller à réduire leurs dépenses de fonctionnement. Est-il normal qu’en 2014, « la masse salariale ait augmenté de 3,9% » ?