Petit-déjeuner avec Jean-Philippe Cotis, directeur de l’INSEE
Publié le 17 novembre 2011Le mercredi 16 novembre 2011, nous avons eu le plaisir d’accueillir Jean-Philippe Cotis, directeur de l’INSEE, sur le thème « Quelles finances publiques pour quelle croissance en temps de crise ? »
«Le dilemme classique entre préserver la croissance et consolider le budget a disparu »
Tous les pays qui, comme la France, approchent du seuil de 90% de pib de dette doivent donner rapidement des signes de rigueur
Il faut stimuler l’offre plus que la demande pour retrouver des gains de productivité
Interrogé sur la façon de conjuguer réduction des déficits publics et reprise économique, Jean-Philippe Cotis a été clair. Avec l’accumulation insoutenable de la dette, « le dilemme classique entre préserver la croissance et consolider le budget a disparu ». Et, selon le directeur général de l’Insee «les effets de défiance associés à l’absence de réforme budgétaire l’emportent sur le soutien à l’activité ».
Au-delà du « mariage pervers » de la sous-épargne des Etats-Unis et de la sur-épargne de la Chine, à l’origine des déséquilibres internationaux actuels, la France est confrontée aux méfaits de l’accumulation, durant 30 ans, de déficits publics qui sont venus alourdir son endettement. Si l’on estime, comme Kenneth Rogoff, à 90% le seuil de soutenabilité de la dette publique, tous les pays qui en approchent « doivent donner rapidement des signes de rigueur ». Or ce ratio atteignait en France 86,2% en juin dernier.
Cette rigueur fait, désormais, consensus. Elle ne doit pas occulter la nécessité de soutenir la croissance. Encore faut-il, pour Jean-Philippe Cotis, prendre la mesure d’une crise qui « a détruit « et » la demande « et » l’offre ». Les « cinq points de pib perdus au cours des trois dernières années, on ne les retrouve pas », tant l’« effet d’hystérésis » de la crise (la persistance de ses conséquences alors que sa cause principale a disparu) est important. En d’autres termes, il nous faut rapidement stimuler l’offre pour permettre aux entreprises d’investir et de retrouver des gains de productivité pour éviter le pire à long terme.
Ce double constat en faveur de la rigueur et de la stimulation de l’offre n’exclut pas l’urgence d’un assainissement du système financier, dont une recapitalisation des banques, car « la dette privée et la dette publique » sont désormais liées. Ni « une gouvernance budgétaire plus vigilante que dans le passé » au niveau de l’Union Européenne. Une discipline qui rompe avec le temps où « chacun s’adonnait à de la carabistouille pour cacher » l’ampleur de ses déficits. Le Fonds Européen de Stabilisation Financière (FESF) constitue une première réponse. Mais en rester à un « ersatz d’union budgétaire n’est plus soutenable ».